L’école à l’hôpital

L’école à l’hôpital

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Aux origines de l’école pour les enfants

Du fait de leur maladie, certains en­fants passent de longues périodes dans les hôpitaux. Dès 1885, l’Assistance pu­blique comprend la nécessité de créer des classes pour eux à l’hôpital.

La 1re école naît à l’hospice des Incu­rables (aujourd’hui hôpital Charles-Foix) le 1er juin 1889 : 56 garçons de 4 à 20 ans prennent place sur les bancs de l’école. Tous les jours, l’instituteur chargé d’ins­truire ces enfants retenus à l’hôpital par des maladies chroniques fait la classe aux élèves que leur état de santé n’oblige pas à rester alités. Ils apprennent à lire, écrire, calculer, et même des notions d’histoire et de géographie, sans oublier les principes de la religion qui tient en­core une place très importante dans la so­ciété à cette l’époque. Chaque année, l’enseignement dispen­sé dans les hôpitaux permet à quelques élèves d’obtenir le certificat d’études.

Salle de classe du service des enfants teigneux, hôpital Saint-Louis, vers 1920.
Salle de classe du service des enfants teigneux, hôpital Saint-Louis, vers 1920.

L’Assistance publique crée également des écoles spécali­sées pour les enfants atteints de certaines pathologies. À partir du milieu du XIXe siècle, des écoles accueillant des enfants touchés par des troubles psychologiques appa­raissent. La 1re école pour les enfants « épileptiques, alié­nés ou idiots » est ouverte à l’hospice des Incurables le 1er octobre 1841. Cet essai ayant donné de bons résultats, le Conseil général des hospices décide de continuer l’ex­périence à l’hospice de Bicêtre : le Dr Ferrus inaugure le service dès 1842, avec 20 jeunes garçons.

La fondation Vallée, créée grâce au legs d’Hippolyte Val­lée, instituteur à l’hospice de Bicêtre, ouvre en 1890 pour accueillir 235 filles « arriérées ». Cet asile départemental, centre psychiatrique dédié à l’enfance et à l’adolescence, autonome depuis 1965, était placé sous l’autorité du di­recteur de l’hospice de Bicêtre. Il se veut comme un com­plément de l’école-asile de Bicêtre, qui accueille plus de 400 garçons en 1905. Les enfants sont occupés du matin au soir. Tous les lieux et gestes de la vie quotidienne sont prétextes à l’apprentissage, à développer l’imagination et le raisonnement : la toilette (hygiène et habillement), le dortoir (nettoyage), la cantine (manger correctement) et même le jardin où des « leçons de choses » ont lieu, grâce à l’étiquetage des arbres, arbustes et plantes. Les prome­nades, effectuées 2 fois par semaine, permettent de dis­traire les enfants, en plus de la gymnastique, de la danse et du chant.

Leçon de chose, fondation Vallée, 1901.
Leçon de chose, fondation Vallée, 1901.

Aujourd’hui, l’hôpital Bicêtre accueille dans une école intégrée 35 élèves de 6 à 12 ans, atteints de troubles des apprentissages (troubles du neurodéveloppement). Les unités de rééducation neurologique infantile (URNI) restent très rares.

À l’école dans la chambre d’hôpital

L’hospitalisation désorganise la vie de l’enfant rythmée par l’école. Les liens so­ciaux avec les camarades de classe et le personnel enseignant sont coupés. L’en­fant se retrouve d’autant plus seul que la vie familiale disparaît également : l’hôpi­tal isole malgré lui l’enfant hospitalisé. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades rappelle que les enfants en âge scolaire ont droit à un suivi scolaire adap­té au sein des établissements de santé. Dans la mesure où leur état de santé et les conditions d’hospitalisation le per­mettent, les enfants reçoivent des cours à l’hôpital. Des associations se mobilisent pour apporter du soutien et de l’aide aux élèves de tout âge. Ainsi, les écoliers, col­légiens, lycéens et étudiants peuvent continuer à travailler selon le programme scolaire. L’école s’invite alors dans la chambre du malade ou du convalescent.

Cours aux enfants malades, 1939.
Cours aux enfants malades, 1939.

L’Éducation nationale et les associations pour l’enseignement des malades à l’hôpital assurent aux élèves une continuité de l’apprentissage scolaire. Travaillant en étroite collabora­tion avec les professeurs de l’Éducation nationale, les ensei­gnants bénévoles des associations apportent leur aide à l’en­seignement dans les hôpitaux de l’AP-HP. L’association L’École à l’hôpital porte bien son nom. Association reconnue d’utilité publique, elle dispense des cours individuels et gratuits aux jeunes malades de 5 à 25 ans en Île-de-France depuis 1929. Chaque année, ses 500 enseignants bénévoles qualifiés dis­pensent en moyenne 24 000 cours individuels gratuits à plus de 4 000 jeunes malades franciliens.

Si le but premier est que les enfants poursuivent leur scolari­té à l’hôpital pour pouvoir reprendre la classe normalement à leur sortie, cette activité fait partie intégrante du processus de guérison. En effet, les professeurs qui viennent à eux per­mettent de recréer un « lieu extérieur » et de mieux supporter les soins et l’isolement. Les jeunes reprennent alors confiance en eux et retrouvent un meilleur moral. Il est même parfois possible de passer le brevet ou le baccalauréat, en même temps que les autres élèves, dans les murs de l’hôpital !

Et pour les malades et convalescents trop faibles pour suivre un cours de français ou de maths, ces temps d’échange leur permettent de garder à l’esprit que même s’ils ne peuvent pas tout de suite retourner à l’école, l’école peut s’inviter dans leur chambre d’hôpital.

L’école à l’hôpital dans le service de neurochirurgie, hôpital Necker-Enfants malades, 1990.
L’école à l’hôpital dans le service de neurochirurgie, hôpital Necker-Enfants malades, 1990.

« Des enfants ne peuvent suivre l’école… L’École vient à l’hôpital… Avec l’autorisation de l’Assistance publique, l’Association de L’École à l’Hôpital veut apporter à la vie de l’esprit, de l’âme, les soins que d’autres donnent à la vie du corps », 1re assemblée générale de l’association, 1929.

Et les adultes dans tout ça ?

Les adultes peuvent également séjourner un long moment dans les hôpitaux. Après une maladie ou un accident, nombre de malades ne peuvent pas reprendre leur métier et vivre comme avant. N’ayant pas toujours la possibilité de se diriger vers des centres de réadaptation, des cours scolaires à l’hôpital peuvent leur être pro­posés afin de revoir ou de compléter les bases de l’enseignement général. Comme chez les enfants, le rôle de l’instruction permet, en plus d’acquérir des savoirs et des connaissances, de se détourner de la souffrance et de la maladie. Des ateliers pratiques peuvent également être propo­sés : outre la distraction qu’ils procurent, ils permettent de reprendre progressive­ment une activité physique et, qui sait, de se découvrir une nouvelle passion. Ces travaux pratiques rejoignent l’effort fait à partir de la fin des années 1920 pour hu­maniser les conditions de séjour à l’hôpi­tal.

Distribution en chambre des revues et des livres de bibliothèque, hôpital Beaujon, 1961.
Distribution en chambre des revues et des livres de bibliothèque, hôpital Beaujon, 1961.

Dans les années 1950, le sanatorium Émile-Roux, qui ac­cueille alors des personnes atteintes de maladies chroniques pour de longs séjours, dispense des cours pour adultes. À tout moment les malades peuvent suivre des cours d’ensei­gnement général ou technique, des ateliers dits « d’occupa­tion », des activités de pré-rééducation (enseignement de base) ou participer aux loisirs proposés dans l’enceinte de l’établissement.

Les cours d’enseignement général ou technique et les activi­tés de pré-rééducation sont particulièrement importants. En effet, en 1955, ils accueillent 130 adultes, dont 70% d’illettrés. Ces derniers ont donc l’opportunité de pouvoir se former à l’hôpital, d’apprendre à lire et à écrire couramment, ainsi que de suivre les matières enseignées jusqu’au brevet. Des cours d’anglais et d’espagnol sont également proposés.

Les ateliers et loisirs sont très variés : photo-club et labo-pho­to, cercle de pyrogravure et atelier de reliure complètent la proposition de manifestations culturelles telles que pièces de théâtre ou conférences.

L’hôpital permet, par le biais de l’instruction, si ce n’est de supprimer les inégalités sociales, au moins de contribuer à les réduire.

Atelier de soudure sur un poste de radio, hôpital Paul-Doumer, 1953.
Atelier de soudure sur un poste de radio, hôpital Paul-Doumer, 1953.

Fêtes, pièces de théâtre, concerts, expositions, prêts de livres ou de magazines… Tous ces divertissements ne sont pas réservés aux enfants ! L’humanisation vise à améliorer le quotidien des personnes séjournant à l’hôpital.