Assister les pupilles de la Seine

Assister les pupilles de la Seine

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Le service des Enfants assistés

Les enfants du département de la Seine orphelins, trouvés, abandonnés ou confiés, sont recueillis par l’Assistance publique de Paris et gérés par le service des Enfants assistés. Cette administration a pour obligation, depuis 1849, de subve­nir aux besoins de ses protégés de 0 à 21 ans, de les éduquer, de les instruire et de les soigner en cas de maladie. Le but est de leur permettre à l’âge adulte de trouver une place dans la société. L’encadrement du service est régi par des instructions et règlements très stricts : des inspecteurs rendent visite aux en­fants de leur circonscription 4 fois par an afin de vérifier que les nourrices, les familles d’accueil et les médecins rem­plissent leur devoir envers les enfants re­levant de leur responsabilité. La gestion de l’enfance assistée est trans­férée au département de la Seine en 1961.

Établissement de l’hôpital des Enfants trouvés et union d’iceluy à l’Hôpital général, 1670.
Établissement de l’hôpital des Enfants trouvés et union d’iceluy à l’Hôpital général, 1670.

Depuis l’Ancien Régime, des hôpitaux et structures chari­tables dédiés recueillent les enfants abandonnés. Ils leur donnent une identité lorsque celle-ci n’est pas connue : une bande de parchemin cousue sur un ruban de fil, ac­croché au cou ou au bras de l’enfant, indique l’année de son entrée, son numéro d’enregistrement, ses nom et prénoms, sa date de naissance et sa date d’admission. Ce ruban sera par la suite remplacé par un collier-médaille d’identité, porté jusqu’à l’âge de 7 ans, quand commence la scolarité de l’enfant.

Le service des Enfants assistés, créé en 1849, permet à chaque enfant d’être logé, nourri, vêtu et éduqué. Selon leur âge et leur condition physique, ils sont soit gardés à l’hospice, soit envoyés dans des centres nourriciers, soit confiés à des familles d’accueil qui s’engagent à leur don­ner une éducation morale et professionnelle. Au 1er janvier 1900, il y avait 46 101 enfants de 0 à 21 ans placés.

La pesée, hospice des Enfants assistés, Saint-Vincent-de-Paul, vers 1880.
La pesée, hospice des Enfants assistés, Saint-Vincent-de-Paul, vers 1880.

En 1670 est créé l’hôpital des Enfants trouvés et orphelins, chargé d’héberger et de soigner les enfants abandonnés.

Billet avec signe de reconnaissance, 1824.
Billet avec signe de reconnaissance, 1824.

Un air de campagne

Au XIXe siècle, la campagne est considé­rée comme un endroit privilégié pour éle­ver et éduquer les enfants assistés. L’air pur et l’exercice physique exigé par les travaux agricoles permettent aux enfants d’avoir et d’entretenir une bonne condi­tion physique, loin de l’atmosphère viciée des villes, des industries et des ateliers. On pense également que l’isolement dans la nature et les champs permet au sens moral de se développer plus activement et plus profondément. Afin de protéger et de valoriser la produc­tion agricole, pan alors majeur de l’éco­nomie, les enfants sont envoyés en prio­rité dans les campagnes françaises pour y recevoir une éducation agricole. En ef­fet, être bon agriculteur suppose un sa­voir-faire, mais également le goût de la profession. Quoi de plus normal donc d’y envoyer les enfants dès leur plus jeune âge pour y faire naître des vocations !

Vergers et cultures, école Le Nôtre, 1939.
Vergers et cultures, école Le Nôtre, 1939.

Les élèves « vicieux, délinquants et vagabonds » sont soit éduqués dans un hospice dédié, soit placés dans des co­lonies agricoles pénitentiaires pour les garçons et en mai­sons religieuses pour les filles. Vouées à remplacer les maisons de correction, ces colonies permettent une édu­cation et une surveillance particulière des enfants diffi­ciles, mis à l’écart, dans un milieu encadré. L’Assistance publique n’étant pas satisfaite des tentatives d’éducation correctionnelle dans les établissements spé­ciaux déjà existants, crée 3 écoles dans le but d’accueillir les enfants indisciplinés :

– l’école maritime de Port-Hallan à Belle-Île-en-Mer (Mor­bihan) : on y apprend la maîtrise du compas, la navigation et ses codes, les phénomènes de marée tout en les met­tant en pratique lors d’exercices en mer. Les enfants ont ensuite la possibilité de s’engager dans la marine mar­chande ou militaire ;

– l’école Roudil à Ben-Chicao (Algérie) : les cours théo­riques alternent avec des exercices pratiques dans les ateliers de menuiserie, de maréchalerie, de vannerie et les travaux de la ferme. On y aborde en priorité les thèmes de l’agriculture et de la viticulture ;

– l’école de réforme de la Salpêtrière qui reçoit essentiel­lement des filles qui souffrent bien souvent de troubles mentaux non décelés à l’époque. Un bâtiment spécial est réservé aux enfants dites incorrigibles.

Les enfants sont principalement envoyés dans les familles d’accueil à la campagne afin de travailler en extérieur.

Registre de suivi des élèves de l’école de réforme de l’hôpital de la Salpêtrière, années 1890.
Registre de suivi des élèves de l’école de réforme de l’hôpital de la Salpêtrière, années 1890.

Des écoles sur mesure

Les enfants envoyés dans les familles d’accueil doivent se rendre à l’école com­munale de 6 à 13 ans (selon la loi de 1882, âge augmenté à 14 ans en 1936 et 16 ans en 1959). L’instruction religieuse est éga­lement obligatoire : les enfants assistent aux offices les dimanches et participent au catéchisme dès l’âge de 10 ans jusqu’à leur 1re communion.

La présence des élèves est contrôlée : les instituteurs et le curé font l’appel sur un registre, régulièrement vérifié par les ins­pecteurs du service des Enfants assistés. Afin d’encourager les familles d’accueil à faire instruire les enfants, une indemni­té financière leur est fournie lorsque l’en­fant poursuit sa scolarité. Une fois l’école communale terminée, les familles se chargent de faire apprendre aux enfants un métier. La plupart des en­fants envoyés dans les campagnes parti­cipent aux travaux agricoles de la ferme où ils ont été accueillis.

Atelier d’ébénisterie, école d’Alembert, 1959.
Atelier d’ébénisterie, école d’Alembert, 1959.

À l’âge de 14 ans, les pupilles sont soumis à un exa­men d’orientation professionnelle. Selon les résultats, ils peuvent poursuivre dans l’enseignement général ou tech­nique, apprendre un métier dans un centre de formation professionnelle ou être mis en apprentissage dans une entreprise industrielle ou artisanale.

Entre 1882 et 1884, 3 écoles de formation professionnelle sont créées par le Conseil général de la Seine :

– l’école d’Alembert à Montévrain (Seine-et-Marne), ré­servée aux garçons, pour apprendre les métiers du livre avec des cours de typographie, imprimerie, clicherie, fa­çonnage, reliure, ou les métiers du bois avec des cours de menuiserie et ébénisterie ;

– l’école Le Nôtre à Villepreux (Yvelines), également ré­servée aux garçons, où sont dispensés un enseignement théorique horticole et des travaux pratiques de culture, réparation et entretien du matériel agricole, ainsi que de petits travaux en menuiserie et serrurerie ;

– l’école ménagère à Yzeure (Allier), réservée aux filles, où l’on apprend la couture, le raccommodage, la confection, la coupe, la tapisserie, la broderie, mais également la cui­sine, le nettoyage et le repassage.

Serre de l’école Le Nôtre, années 1930.
Serre de l’école Le Nôtre, années 1930.
Réfectoire de l’école ménagère, années 1930.
Réfectoire de l’école ménagère, années 1930.

Depuis 1932, selon son mérite et sa capacité, une jeune fille recueillie comme enfant assistée peut suivre des cours préparatoires à l’entrée de l’école d’infirmières de l’Assistance publique.