La Guerre, l’A.P. : l’Assistance publique dans la Grande Guerre

La Guerre, l’A.P. : l’Assistance publique dans la Grande Guerre

La Première Guerre mondiale oblige l’Assistance publique de Paris et ses hôpitaux à se réorganiser : ils doivent faire face à la réquisition de lits, aux pénuries de denrées, de matériels et de personnels tout en soignant un très grand nombre de civils et de militaires qui afflue, au rythme des offensives et des bombardements d’une violence incomparable.

Militaires convalescents dans les jardins de la Salpêtrière, janvier 1916
Militaires convalescents dans les jardins de la Salpêtrière, janvier 1916

Un mois après le début de la guerre, les Allemands sont aux portes de Paris. Face à l’urgence et au très grand nombre de blessés, les hôpitaux militaires et temporaires sont rapidement débordés. Le Service de santé des armées se voit alors obligé de réquisitionner les hôpitaux civils pour recevoir des soldats blessés. L’Assistance publique doit s’organiser pour rendre disponibles 2 000 puis 4 500 lits dans 23 de ses établissements. En février 1915, un modèle de convention entre l’autorité militaire et l’administration de l’Assistance publique permet de régler les modalités de prise en charge des blessés militaires par celle-ci. Parallèlement, des flots de réfugiés de Belgique et des départements envahis arrivent à Paris complètement démunis et dans un état sanitaire nécessitant des soins. Les services médicaux sont de plus en plus surchargés.

Passée l’urgence des premiers temps et avec la stabilisation de la situation militaire, les établissements de santé doivent faire face pendant toute la durée de la guerre aux pénuries de toutes sortes (transports, denrées, matériels). La plus grosse difficulté à laquelle les services médicaux et hospitaliers sont confrontés est le manque de personnel.

1916-1917

La situation hospitalière est marquée par le rythme des batailles. Chaque grande offensive française ou allemande engendre un afflux de blessés. Celles de Champagne (septembre-octobre 1915) et de Verdun (février-décembre 1916) se traduisent dans les hôpitaux de l’Assistance publique par des pics dans l’accueil des soldats blessés : plus de 3 500 hospitalisés pendant ces périodes.
Évacués du front, après être passés par de multiples filtres (ambulances, hôpitaux militaires organisés en plusieurs lignes), les militaires qui arrivent dans les hôpitaux civils requièrent des prises en charge spécifiques : traitement chirurgical des « gueules cassées » dans les services des docteurs Sebileau à Lariboisière et Morestin à Saint-Louis, traitement des « maladies nerveuses » dans les services des docteurs Babiński à La Pitié et Déjerine à la Salpêtrière, tuberculeux dans le service du docteur Sergent à la Charité.

1918
La guerre de mouvement se rappelle à Paris. La capitale et sa banlieue sont touchées par de nombreux bombardements de février à août 1918. Les mesures sont prises pour mettre à l’abri les patients en cas de raids aériens ou de tirs d’obus des canons à longue portée (« les grosses Bertha ») – aménagement d’abris, éclairage nocturne limité au maximum, constitution d’équipes de lutte contre les incendies – et pour les soins à donner aux victimes (permanence chirurgicale, salles d’opérations souterraines) mais aucune évacuation n’est organisée.
À partir du mois de septembre 1918, l’Assistance publique doit faire face à un nouveau fléau : l’épidémie de grippe espagnole. En plus des militaires toujours hospitalisés, près de 17 000 grippés sont admis dans les hôpitaux du 25 septembre au 15 novembre 1918.
L’armistice signée le 11 novembre 1918 met fin à la guerre mais pour les hôpitaux l’organisation liée au conflit se poursuit au cours de l’année 1919.

En septembre 1914, l’évacuation des populations fragiles accueillies dans les hôpitaux est organisée. Il s’agit à la fois de les mettre à l’abri mais aussi de libérer des lits pour recevoir les militaires blessés. En quelques jours les enfants (hospice de Brévannes, orphelinat de Forges-les-Bains …), les vieillards (maison de retraite des Ménages, hospice d’Ivry…), les tuberculeux (sanatorium d’Angicourt) sont soit rendus à leurs familles, soit convoyés en train vers des établissements similaires de province, dans des conditions matérielles difficiles voire parfois effroyables. En 1918, alors que les Allemands bombardent Paris, l’Assistance publique envisage à nouveau l’évacuation de ses établissements les plus menacés. Des institutions scolaires telles que l’École normale d’institutrices de Draguignan sont sollicitées pour recevoir éventuellement des hospitalisés. Finalement ces mesures ne seront pas mises en œuvre.

Parallèlement, de nouveaux patients arrivent à l’hôpital. Parmi eux, les femmes : femmes enceintes « violentées » par l’ennemi – peu nombreuses contrairement aux rumeurs qui effraient la population – mais également les femmes qui participent à l’effort de guerre dans les usines (les « munitionnettes ») et pour lesquelles des consultations spéciales sont ouvertes le soir à partir de 1916.

C’est aussi par ses actions de secours et d’assistance envers les populations démunies que l’Assistance publique joue un rôle capital pendant cette période.

Lire l’article de Yannick Marec Les secours de l’Assistance publique de Paris pendant la guerre.

En quatre ans de conflit, les hôpitaux parisiens accueillent 106 231 militaires. Ils reçoivent pour la première fois un fort contingent de jeunes adultes pour de longues périodes d’hospitalisation. En effet, il ne s’agit plus d’accueillir et de soigner des indigents ou des personnes venant pour un temps plus ou moins limité mais de prendre en charge des héros ayant mérité la reconnaissance de la patrie. La qualité de la prise en charge médicale mais aussi matérielle et hôtelière se doit d’être irréprochable dans tous les domaines. Symboles de ces mutations, des cafés et des divertissements sont installés au sein même des hôpitaux. Fondée le 28 octobre 1914, une œuvre de bienfaisance appelée “ Le Foyer du Blessé ” se donne pour but de procurer aux soldats des distractions de toutes sortes dans les hôpitaux, dont les principaux possèdent un foyer où ils se retrouvent. L’article premier des statuts de l’association stipule : « il est fondé, entre les adhérents aux présents statuts, sous le nom de “ Le Foyer du Blessé ”, une association ayant pour but de créer, dans chaque établissement hospitalier dépendant de l’Assistance publique, une salle qui sera aménagée spécialement et qui constituera pour les blessés une sorte de “ mess ” […] où ils trouvent, jeux, livres, journaux, tabac, papier à lettre, boissons chaudes, et une permanence où ils rencontrent des amis qui s’efforcent de remplacer auprès d’eux la famille absente, et de leur rendre tous les services dont ils peuvent avoir besoin en dehors de l’hôpital […] en un mot, d’apporter aux blessés soignés dans les hôpitaux, toutes les douceurs matérielles et morales destinées à atténuer leurs souffrances, à les consoler et les distraire dans la mesure du possible. » Un groupe artistique de cette œuvre se déplace d’hôpital en hôpital, donnant 500 concerts en 1915.

Avec la mobilisation de l’empire colonial de la France, de nombreux « indigènes » – soldats mobilisés dans ses colonies – sont blessés. Des lieux d’hospitalisation leur sont alors réservés. Ainsi est créé fin novembre 1914 un service spécial pour l’accueil des blessés des troupes indigènes à l’hôpital Cochin. Le ministre de la Guerre insiste pour qu’ils soient regroupés « suivant qu’ils sont Algériens, Tunisiens ou Marocains », tout en restant « en contact immédiat avec des soldats des troupes métropolitaines ». Les troupes indigènes reçoivent plusieurs visites officielles : le chérif Brahim El Hadj Mohamed, chef religieux (le 20 janvier 1915), le chérif et grand vizir marocain Mohamed El Mokri (le 21 février 1915), El Hadj Omar Tazi, pacha de Casablanca (le 18 juillet 1915), le général Lyautey, résident général de France au Maroc (le 21 juillet 1915). Ces attentions particulières données à cette catégorie de soldats ont pour but de les entretenir dans un juste sentiment des efforts réalisés par la métropole pour reconnaître leur courage et leur dévouement à la défense nationale. En souvenir de l’implication particulière des soldats musulmans dans la guerre, l’hôpital franco-musulman de Bobigny sera ouvert pour accueillir leurs coreligionnaires en 1935.

Lire l’article de Marc Dupont L’Assistance publique, l’armée, la guerre.

Dès 1912, l’administration générale de l’Assistance publique se préoccupe de connaître les effectifs mobilisables susceptibles d’être remplacés ou non. Une grande partie du personnel médical, hospitalier, administratif et ouvrier est mobilisée (notamment 1 200 hospitaliers et 530 ouvriers). Un sursis d’appel peut être accordé aux agents à la tête de postes clés afin de perturber le moins possible le service, mais il n’est que de quelques semaines.

L’Assistance publique paye un lourd tribut à la guerre :  604 morts ou disparus. Le personnel de l’Assistance publique présent et mort au champ d’honneur a été célébré par l’intermédiaire de brochures puis par voie d’affiches et de plaques commémoratives, dès 1916. L’Association des anciens combattants et victimes de guerre (civiles et militaires) de l’Assistance publique de Paris est créée dès 1920. Elle fusionne en 1949 avec celle de la Ville de Paris pour devenir l’Union amicale pour la mémoire des personnels anciens combattants, victimes de guerre, du devoir patriotique et professionnel de l’Assistance-publique-Hôpitaux de Paris, du Crédit Municipal, des Préfectures et de la Ville de Paris.

Dès le 3 août 1914, de nombreux volontaires se proposent comme garçons et filles de salle pour le remplacement du personnel mobilisé. La centralisation des candidatures est confiée à l’hospice de la Salpêtrière et à l’hôpital Saint-Antoine. La priorité est donnée aux familles des mobilisés et il est recommandé de limiter le recrutement d’hommes. Cependant, les effectifs manquant ne sont remplacés que partiellement. La réduction à la portion congrue du personnel auxiliaire des hôpitaux de Paris fait entrer ce médecin dans une colère noire : « Croit-on pouvoir remplacer des infirmiers par un personnel civil improvisé ? […] Quand il faut soulever un malade sur son lit, transporter un typhique dans son bain, maintenir un épileptique, on s’adressera sans doute aux infirmes et aux débiles ? » (Le Temps, 21 novembre 1914). Mais généralement ce sont le dévouement et l’exemplarité du personnel qui sont loués dans cette période difficile.

L’administration centrale n’a cessé de souligner dans ses rapports durant la guerre « la plus touchante sollicitude et le plus admirable dévouement » des infirmières vis-à-vis des militaires admis dans les hôpitaux, reconnaissant ainsi l’excellence de la formation des infirmières de l’école de la Salpêtrière.

Lire l’article de Christian Chevandier Soigner à l’Assistance publique de Paris, 1914-1919.

La guerre entraîne la recrudescence des fléaux sanitaires de la fin du XIXe siècle, tant dans la population civile que chez les soldats. Bien que rendues nécessaires par la guerre, l’administration et les professionnels ne perdent jamais de vue l’intérêt que ces mesures et expériences constitueront pour la suite (« éducation hygiénique » des militaires tuberculeux, traitement ambulatoire des syphilitiques).

Tuberculose

À Paris, en 1914, la tuberculose provoque le décès de 12 000 adultes 2 000 enfants. Les consultations spéciales réservées aux tuberculeux dans les hôpitaux de La Charité, Laennec, Lariboisière sont progressivement réquisitionnées pour le traitement des blessés militaires de même que les quartiers des tuberculeux de l’hospice de Brévannes et du sanatorium d’Angicourt.

La maladie fait également des ravages dans les rangs des militaires (« les blessés de la tuberculose ») augmentés encore à partir de 1915 par les attaques aux gaz asphyxiants. Le docteur Émile Sergent, médecin à l’hôpital de La Charité, mobilisé comme médecin chef à l’hôpital complémentaire VR64 au Vésinet, fait en mai 1916 des propositions sur la réforme des militaires tuberculeux. Il regrette les instructions qui, au début de la guerre, étaient de mobiliser le plus d’hommes possible. « La balle d’un phtisique est aussi meurtrière que celle d’un homme bien portant. » dit-on et il ajoute « si la balle d’un phtisique est peut être meurtrière pour l’ennemi qu’elle atteint, les crachats du même phtisique le sont toujours pour ses camarades de dépôt ou de tranchées. »

Face à l’afflux de réformés, l’Assistance publique décide en 1916 de construire dans les hôpitaux disposant d’espace suffisant des « baraquements de tuberculeux » pour une capacité de 2 500 lits. La Ville de Paris assure la charge de leur fonctionnement. Ces installations provisoires sont mises en service l’année suivante. Ainsi, les hôpitaux Lariboisière, Laennec, La Salpêtrière, La Rochefoucauld, Cochin, Tenon, Saint-Antoine et Broussais se voient dotés de pavillons. Les familles de soldats sont également prises en charge : les femmes à l’hospice d’Ivry, les enfants dans les pavillons de l’hospice Debrousse. Enfin les hospices de Bicêtre et de Brézin reçoivent également des civils.

Syphilis

Pendant la guerre, le développement des maladies vénériennes en général et de la syphilis en particulier est alarmant. Aux moyens de prévention et de traitement mis en œuvre sur le front s’ajoutent les actions déployées à l’arrière. L’Assistance publique installe des dispensaires spécifiques dans les hôpitaux Broca (1914), Cochin-Ricord (1916) et Saint-Louis (1917). Ils tiennent une consultation en soirée, permettant à la population de se faire soigner après sa journée de travail.

Les avancées thérapeutiques (découverte du 606 par l’Allemand Ehrlich, utilisation des arsénobenzols) permettent de soigner un grand nombre de malades. Cependant, malgré les progrès des traitements et l’amélioration de la prise en charge des malades, la guerre réunit toutes les conditions favorables à la propagation de la maladie, chez les militaires et chez les civils.

À la fin du conflit, la situation est toujours très préoccupante. Certains médecins reprochent au secrétariat d’État du service de santé militaire d’avoir encouragé le retour de soldats « blanchis » mais encore contagieux sur le front. La prévention et l’information par voie d’affichage continuent d’être utilisées comme moyen de lutte contre la syphilis.

Lire l’article de Gérard Tilles Syphilis, syphilitiques et syphiligraphes dans les hôpitaux de l’Assistance publique.

La guerre 1914-1918 est nouvelle par la violence qu’elle génère. Dans les tranchées, les soldats subissent les bombardements, les tirs de l’artillerie, les bruits des explosions. La confrontation inopinée avec la mort entraîne chez beaucoup des pathologies mentales que les anglais appellent « shell shock » et les français « obusite » ou « commotion ». Ces blessures psychiques sont sous-évaluées à l’époque, le commandement craint les simulateurs. En effet, certains combattants cherchent un prétexte (mutilations volontaires, simulation de troubles nerveux) pour ne pas être renvoyés au front mais leur proportion reste faible.

Face à ces maladies, la neurologie et la psychiatrie, encore balbutiantes, se montrent souvent impuissantes. L’une des méthodes utilisées pour soigner les malades est le traitement par l’électricité (le « torpillage »), parfois très violent et contesté. « Si beaucoup de ces soldats sont réformés et finissent la guerre dans leurs foyers, certains, après avoir été récupérés lors des phases de remobilisation intensive, sont tués sur le front. Combien de fous sont-ils morts pour la France ? … A côté du zèle de quelques médecins neurologues, soumis à l’injonction militaire ou s’en servant à des fins professionnelles en affichant leur investissement dans la « récupération », de nombreux praticiens ont continué à être des soignants. Après avoir signalé le rôle de la guerre dans les maladies mentales de leurs patients, de nombreux praticiens contribuent à réformer les soldats et à les renvoyer à leurs familles sans que cela ne contredise leur patriotisme […] Les pratiques des neurologues et des psychiatres de la Grande Guerre sont peu innovantes. Elles poursuivent des formes de traitements psychothérapeutiques et biologiques initiées bien avant-guerre. »1« Les principes généraux du traitement sont ceux du temps de paix », rappelait d’ailleurs Gustave Roussy en 1917.

En France, les troubles psychiques de guerre ne seront officiellement reconnus qu’avec le décret du 10 janvier 1992.

Lire l’article de Jacques Poirirer Le torpillage des poilus par Clovis Vincent, médecin des hôpitaux de Paris.

1 TISON, S., GUILLEMAIN, H., Du front à l’asile, 1914-1918, Alam éditeur, Paris, 2013, p. 353-355.

La place des fondations étrangères constitue une particularité dans les établissements de soins aux soldats blessés évacués sur Paris. Parrainées par les ambassades des pays amis de la France, elles illustrent leur implication dans le conflit et leur lien avec notre pays. C’est ainsi, par exemple, qu’en 1916, le gouvernement du Brésil installe un hôpital militaire dans les locaux d’un ancien collège de Jésuites, sur le site de l’actuel hôpital de Vaugirard. L’établissement bénéficie de l’aide de chirurgiens brésiliens et de matériel médical envoyé par le Brésil.

Après l’invasion de la Belgique en août 1914 et l’afflux de réfugiés, la Ville de Paris décide la création d’un hôpital réservé aux soldats blessés et aux civils de nationalité belge. Baptisé hôpital militaire Albert Ier, il est installé dans les pavillons de la maternité de l’Hôtel-Dieu.  Il compte 182 lits et dispose des services généraux de pharmacie, cuisine, blanchisserie, chauffage, bains, radiographie, électrothérapie, laboratoires, chapelle et aumônerie. Les salles, qui portent le nom des principales villes de Belgique, sont décorées par les soins du service des Beaux-Arts de la Ville de Paris. Le service médical est assuré par du personnel hospitalier et des médecins des hôpitaux.
Il est inauguré le 20 décembre 1914 en présence du vice-président du Conseil des ministres belge Henry Carton de Wiart, du président du Conseil français René Viviani, du préfet de la Seine Marcel Delanney, du préfet de police de Paris Émile Laurent, du président du conseil municipal de Paris Adrien Mithouard, et du directeur de l’Assistance publique Gustave Mesureur. Le Président de la République, Raymond Poincaré visite l’hôpital le 19 mars 1915.
La Ville de Paris, « en témoignage de sa profonde sympathie pour la Belgique », décide de prendre à sa charge les frais d’admission des patients belges. La solde des militaires est payée par l’économat de l’Hôtel-Dieu, qui est remboursé par le bureau militaire belge de Paris. Les vivres, médicaments et pansements sont fournis par l’Hôtel-Dieu. Une interprète parlant flamand est adjointe au personnel hospitalier. Un ouvroir pour fourniture d’effets de linge et d’habillement aux soldats est installé par les soins et sous la direction de Martine-Marie-Pol de Béhague, comtesse de Béarn. Les sollicitations de divertissements à donner aux soldats sont nombreuses (concerts, pièces de théâtre).

En mai 1917, l’inspecteur technique Cally, du Service de l’Inspection, écrit dans un rapport sur le fonctionnement des laboratoires de radiologie pour l’année 1916 : « Du fait de la guerre, les services, en général, ont été, particulièrement ceux de radiologie, surchargés de militaires. Le nombre de recherches de projectiles et corps étrangers de toute sorte, s’est accru dans des proportions inconnues jusqu’à ce jour et a amené l’utilisation d’instruments et d’appareils spéciaux divers qui, tous ont donné d’excellents résultats, puisque nos chirurgiens obtiennent tous les jours, grâce à eux, des résultats parfaits et que l’on est allé, dans cet ordre d’idées, jusqu’à rechercher, localiser et extraire avec succès des projectiles logés dans le ventricule du cœur lui-même. »

La découverte du rayon X en 1895 par l’allemand Röntgen trouve rapidement des applications dans le domaine médical. En France, Antoine Béclère promeut cette nouvelle technique. Lorsque la guerre éclate peu de médecins sont formés mais il apparaît vite que la radiographie est indissociable de la chirurgie pour le traitement des blessures subies par les soldats : blessures des membres avec fractures complexes et recherche de projectiles ou de corps étrangers constituent alors les opérations les plus fréquentes. Selon les cas, la méthode employée peut être la radioscopie associée à l’utilisation du compas ou la radiographie. À Paris, Antoine Béclère organise les laboratoires de radiologie dans les hôpitaux. Il dispense un enseignement pour les médecins au Val-de-Grâce tandis que sur le front, sous l’impulsion de Marie Curie, les formations sanitaires reçoivent des véhicules (autochirs, groupes complémentaires de chirurgie) dont l’équipement est rendu plus léger et plus mobile pour gagner en efficacité.